dimanche 15 novembre 2015

Attentats : Ai-je le droit d'avoir peur ?

Cet article n’intéresse que moi au départ. C’est un besoin naturel chez moi, de mettre par écrit mes pensées lorsqu’elles sont trop douloureuses. (Soyez ravis de ne pas toujours devoir les partager.) Je m’accorde donc le temps de poser mes maux et peut-être aussi les vôtres. Et je partage mes réflexions, mes questions, ma peine, mon deuil…

Vendredi 13 novembre 2015

Carte des attaques terroristes du 13-11-2015 PARIS
Au  surlendemain du 11 novembre jour célébrant l’Armistice de la Première Guerre mondiale, au lendemain de la naissance de ma petite nièce (Louise, née le 12 novembre 2015) et à la veille du premier anniversaire de mon neveu (Mathis, né le 14 novembre 2014), lors d’une soirée ordinaire, Arnaud me dit « Il y a une fusillade dans Paris. » Ce n’était que le début de l’horreur…
Dimanche 15 novembre 2015
Depuis « Charlie », je n’étais plus comme « avant ». Depuis vendredi, je ne suis plus comme après « Charlie » non plus. Mais tout se passe à l’intérieur de mon corps et de mon esprit. On pensait avoir vu le pire, pour une caricature, mais ce n’était que les prémisses d’une guerre qui ne semble pas pouvoir s’achever…
Hier dans la nuit, j’ai appris le décès, plus exactement l’assassinat de Claire, l’amie d’une amie. Et je n’ai pas trouvé les mots pour réconforter cette amie. Je me suis sentie impuissante, face à tant de douleur et de tristesse perceptibles, et je continue de l’être.  Je ne tiens pas à écrire pour me plaindre et faire de mes états d’âme le centre de toutes vos attentions, non, pas du tout. Mais je suis, comme des millions de français, une victime collatérale de ces attentats de Paris. 
Pour l'anecdote, saviez-vous qu’à 23h vendredi, Wikipédia avait déjà créé la page « Attentats de Paris dans la nuit du 13 au 14 novembre 2015 » ? Saviez-vous qu’à 23h30, la page du Bataclan était actualisée « L’établissement subit une attaque terroriste le 13 novembre 2015. » ? Avec un peu de recul, cela me laisse perplexe. Dans cette panique générale, alors que la France est transie d’horreur, d’effroi et de confusion, certains ont eu la présence d’esprit de mettre ces informations sur la toile…

La pudeur d’une victime collatérale

J’ai la chance, oui la chance, de n’être qu’une victime collatérale de ces attentats terroristes. Je pense qu’on peut parler de chance, car comme beaucoup, je peux m’identifier aux victimes. Je vis en banlieue parisienne, et j’aime vivre dans la perversité, puisque non seulement j’écoute de la musique chez moi, mais en plus, j’ai l’audace d’assister à des concerts de temps en temps. Et summum de mon insolence, mon conjoint, Arnaud, est bassiste… Le vendredi 6 novembre dernier, nous traversions d’ailleurs tous les deux les 10è et 11è arrondissements de Paris, à la sortie d’un concert au Grand Rex. Cela aurait pu être moi, toi, ou les autres, mais non, c’était eux. Ce n’est pas une catégorie d’artistes ou de musique qui sont visées, c’est la Musique, c'est l’Art en général, quel qu’il soit, c’est le simple fait de vivre à l’occidentale.
Je ne suis pas touchée personnellement, dans le sens où je n’ai pas à déplorer la blessure ni la mort d’un proche. Pourtant, je suis touchée en plein cœur. Je souffre. Je pleure. Je m’étouffe. J’angoisse. Je panique. J’ai mal. Je suis triste. Je suis blessée. Et ma blessure, semblable à celle de nombre de mes compatriotes, ne se guérira sans doute qu’avec le temps, si seulement on nous laisse le temps de nous relever...


La perversité détournée

La définition la plus juste de perversité est celle-ci « Caractère d’une personne encline au mal, qui fait mal et qui aime à faire le mal. »
Une définition psychopathologique serait la suivante : «  Anormalité de la conduite générale et spécialement des comportements à l’égard d’autrui et de la société, conduisant à des actes asociaux et inhumains accomplis avec une indifférence affective à l’égard de la souffrance d’autrui, absence complète de culpabilité, avec une certaine satisfaction personnelle. » (1969 - Roger Mucchielli, psychosociologue et neuropsychiatre).

Extrait du communiqué de Daesh


Alors quand Daesh raconte dans son communiqué de revendication du 14 novembre (ci-contre), vouloir punir des gens (toi, moi et les autres) qui assistaient à une fête de perversité, j’ai envie de hurler et de vomir. Malheureusement, ça ne change rien. Ça ne change rien de redonner aux mots leur juste valeur et leur sens exact, car nous sommes face à des incultes, des ignorants. Platon écrivait que : « On ne fait le mal que par ignorance du bien. » Cela reviendrait à dire que ces ignorants terroristes ne cherchent pas à faire le mal, puisqu’ils ignorent ce qu’est le bien. Non, ces bâtards sont des incultes et des ignorants par nécessité. Moins ils connaissent le sens des mots qu’ils clament haut et fort en l’honneur d’un dieu, plus ils agissent comme des bêtes sauvages enragées, se croyant dotées d’une dose d’humanité honorable.




« Même pas peur ! » ... Ah bon, vraiment ?

Sans doute suis-je déjà dans un état d’esprit qui favorise et oriente mes pensées, mais je suis en colère quand je constate que des gens se cachent de leurs angoisses et de leurs craintes, quand je les vois porter fièrement leur pancarte « Même pas peur ! »
Kim Phuc, au centre, brûlée au napalm - Vietnam 1972
Qui peut prétendre ne pas avoir peur à Paris depuis le 13 novembre ? Apparemment ils sont nombreux. Vous en faites peut-être partie d’ailleurs. Et vous m’expliquerez peut-être pourquoi vous n’avez pas peur. Pour moi, il n’y a pas encore d’explication recevable à cette absence de peur, si fièrement revendiquée. Ne pas avoir peur, et vouloir continuer à vivre comme si rien ne s’était passé, ou pire encore, être pleinement conscient de l’actualité, et penser que nous, français, parisiens, banlieusards ou provinciaux, nous devons afficher notre détachement en signe de défit, comme si nous allions gagner au jeu du « même pas peur ». Seulement est-il possible de gagner la partie dans un jeu macabre à sens unique?

« Eh ! Daesh, vous avez vu ? Nous les français, on n’a pas peur ! »

Est-ce que l’on peut rendre crédible cette idée, sincèrement, sans passer pour des menteurs ? Non, ça ne marchera pas. Et ce n'est pas grave de passer pour des menteurs. Ce qui est grave, c'est de refouler nos sentiments. L'effroi, la terreur et la peur ont sonné leur entrée dans notre pays, et ne pas l'admettre, c'est ne pas vouloir reconnaître la gravité des faits. 
Que nous ayons peur ou pas, cela n’aura aucun impact sur les actes terroristes à venir. Cela ne les empêchera pas. Peut-on penser qu’un terroriste en puissance ou déjà avéré se dise « Ça ne sert à rien de recommencer à semer la terreur sur Paris, les français n’ont pas peur. » Hélas non, ce n’est pas crédible, c’est même crédule.
Alors oui, « heureusement »,  je pense que les gens ont peur. Les gens sont terrorisés, résultat intentionnel des actes terroristes commis sur nos sols. Et les gens ne devraient pas masquer leur peur. Croyez-vous que les peuples en guerre n’ont pas peur ? Ne sommes nous pas en guerre ? 
Croyez-vous que les peuples qui voient leur famille décimée au Moyen-Orient, en Afrique Centrale ou en Afrique du Nord n'ont pas peur ?

Attendre pire pour avoir peur ?

Faut-il que des attentats éclatent chaque semaine, à tous les coins de rue, pour que le sentiment de peur soit toléré ? La définition de peur est la suivante « Émotion ressentie en présence ou dans la perspective d’un danger ou d’une menace. » Alors celui qui affiche son « même pas peur » avec fierté est peut-être lui aussi ignorant du bon sens des mots.
Mais après Charlie, rappelez-vous, nous avions peur pour la liberté d’expression, pour la République, la Démocratie. Et après le 13-11-15, nous devrions nous abstenir de clamer notre peur ? Mais au nom de quoi, de quelle religion, de quelle idéologie?
Recueillement, rue Bichat, 14-11-2015 Paris
N’avez-vous pas peur pour aujourd’hui et demain ? Peur que votre simple nationalité française vous rende coupable de tous les maux, de toutes les perversités, de toutes les fautes aux yeux de ces ahuris de terroristes extrémistes ?
N’avez-vous pas peur que demain, votre enfant, votre conjoint, votre ami, votre voisin, votre boulanger, votre facteur, votre livreur de pizza, votre collègue soit déchiqueté par une bombe ou assassiné de sang-froid par un islamiste radical ? N’avez-vous pas peur que demain, le téléphone de votre proche ne réponde plus à vos appels et qu’on vous apprenne plus tard, qu’il a succombé aux blessures occasionnées par des tirs de kalachnikov alors qu’il se promenait dans la rue ?
Moi j’ai peur de ça. J’y pense. Je suis maman de deux enfants, dont un qui suit une scolarité dans une école parisienne. J’ai peur qu’il prenne le métro, qu’il marche dans la rue, qu’il croise la route d’un kamikaze, d’un terroriste.

Continuer à vivre

Alors oui, il faut continuer notre vie, malgré toutes ces horreurs.  « Il faut continuer d’avancer », comme ils disent tous. Il faut reprendre le « cours de nos vies », parce que personne ne payera nos factures ni ne fera nos courses à notre place, parce que le Gouvernement ne nous dispensera pas de payer nos impôts, parce que notre patron ne nous versera pas de salaire sans travail. Et par delà nos contraintes, nous avons toujours des instants heureux à venir et à partager.
Oui, on doit continuer à vivre, mais il me semble important de ne pas oublier l’actualité, de ne pas oublier que Daesh décrit ces attentats comme le début de la tempête. Ne pas oublier que le risque est imminent, il est partout. Et quand on pense à cela, comment ne pas avoir peur ?
Doit-on être rassuré parce que ces huit salopards sont morts ? Doit-on imaginer que le Gouvernement a pris les choses en main, et qu’avec cet état d’urgence décrété, nous sommes à l’abri désormais de leur folie ? Mais non voyons ! C’est même tout le contraire…
Peace for Paris - Jean JULIEN - 2015
Ils sont des dizaines, peut-être des centaines voire des milliers de cinglés extrémistes à envisager un passage à l’acte, au nom de Daesh ou de tout autre groupe terroriste. Ils sont nombreux ces extrémistes radicaux à vouloir partir en martyre. Rendez-vous compte qu’ils sont prêts à mourir pour causer notre perte, à nous Français, parce que nous représentons toute la liberté qu’ils décrient et qu’ils redoutent, une liberté qui met à mal leur étroite façon de penser, leur vie médiocre dictée par des interprétations stupides et infondées de ce qu’ils osent appeler leur religion.
Bien entendu, nous allons continuer à vivre nos passions, à écouter de la musique chez nous et en concert, à rire d’un rien mais aussi de tout avec nos amis, à garder nos villes et notre pays vivants.
L’intention de mon article n’est pas de renforcer le sentiment de peur, mais simplement de l’autoriser. N’ayons pas honte d’avoir peur, ni d’avoir de quelconques émotions, car après tout, nous, nous sommes humains.





lundi 16 février 2015

IEF-Contrôle de l'inspection académique : demandez le programme!


Je vais me mettre ici dans la peau d’une maman, qui nous raconte le déroulement de la visite d’une inspectrice académique (qui sera finalement remplacée par une conseillère pédagogique) et d’une psychologue scolaire, dans le cadre de l’instruction en famille (IEF) de son enfant de 10 ans, CM.2 L’histoire est vraie, mais les prénoms ont été modifiés. J'ai été moins "ironique" que d'habitude, mais le sujet ne se prêtait finalement pas tant que ça au second degré que j'affectionne. Un peu de sérieux, ça ne fait pas de mal de temps en temps...

Il était une fois, un jour de février, la famille Simpson. Cette famille allait vivre sa première rencontre avec un membre de l’IA (Inspection académique – rien à voir avec le IA de CIA) et une PS (Psychologue scolaire – rien à voir avec le PS politique).

Voici le récit de Marge…


Il est 9h45, le rdv est prévu à 10h à la maison. J’épie la rue depuis la fenêtre de la cuisine, quand je vois alors une voiture ralentir devant chez moi. Une femme blonde, la cinquantaine, seule dans son véhicule, fait finalement demi-tour et se gare quelques mètres plus loin.

Je sais qu’il s’agit de l’une des deux personnes que nous attendons de pieds fermes, soit la psychologue scolaire, soit l’inspectrice de l’Académie de notre département…
La femme (qui est en avance) doit sans doute attendre sa « partenaire » de contrôle. Elle flippe peut-être un peu de venir seule chez moi. Après tout, ne sommes-nous pas tous des parents formateurs de terroristes en puissance ? (Ahahah ! Lire l'article IEF- Formations secrètes pour le djihad)

Pendant ce temps, au chaud dans ma cuisine, je profite de ce quart d’heure dont je dispose encore, pour me faire couler un café, et fumer une cigarette (à la fenêtre). Petit Papa Noël est dans le garage (le chien). Je vérifie que tout est en place : Charlie Hebdo en évidence, kalachs rangées à l’abri des regards, la couverture du « Manuel du Djihadiste » remplacée par celle de « 20 000 lieues sous les mers », la drogue camouflée, et j’ai même pris le temps d’installer un pêle-mêle de photos dans le salon, avec tous les membres du Gouvernement actuel, et la photo de Najat (NVB – ministre de l’EN) dans un cadre en forme de cœur…

Tout est en place. Le petit Bart est peigné, rasé, habillé d’un jean et d’une chemise, il s’est même parfumé pour l’occasion. Soudain, alors que je m’aperçois de l’oubli malencontreux de la photo de Bart dans les bras de Ben Laden (photomontage évidemment), j’entends le « ding dong » de la sonnette. Je planque la photo vite fait dans un tiroir du buffet et je vais ouvrir.

-          Bonjour, je suis Mme TRUC, psychologue scolaire. Vous êtes bien Madame Simpson ?

-          Bonjour, oui, c’est bien moi. Vous êtes seule ? (je pose la question, je vois bien qu’elle est seule, mais je voulais lui faire remarquer que j’avais vu)

-          Oui, je pense que Mme MACHIN ne va pas tarder à arriver.

-          Ah, espérons-le. Allez-y, entrez. (Je pense avoir déjà, à ce moment précis, un air « blasé »)

Là, une première idée me vient à l’esprit : laisser Mme TRUC attendre l’arrivée de Mme MACHIN sur le perron.  Mais je me montre plutôt « cool » sur ce coup là, et je la laisse rentrer, se mettre au chaud, dans mon salon. On fait les présentations : Homer-Madame Truc/Bart-Madame TRUC … Bart fait belle impression. Il est tout beau, poli,, souriant et se réjouit de pouvoir parler sans qu’on l’interrompe (pour une fois – oui parce que Bart est très bavard !).

J’amène mon mug de café dans le salon, et nous sommes tous les quatre autour de la table. Boule-de-neige (le chat) vient se poser sur Mme TRUC, qui le remet délicatement au sol.

Et là, une deuxième idée me vient à l’esprit : Et si je proposais à Mme TRUC un café ou une boisson fraîche ? Mais je me montre plutôt « chienne » sur ce coup là, et je savoure ma prochaine gorgée de café en la détaillant.

Je la relance: « Avez-vous des nouvelles de Mme MACHIN ? » Elle sort son portable (coque hyper flashy) et appelle l’inspection académique. Elle tombe sur une secrétaire qui lui apprend que Mme MACHIN est en route. J'en conclus qu'elle n'a pas le numéro de portable de sa "collègue" dans son répertoire, ce qui m'étonne...

Une troisième idée me vient à l’esprit : Je lui ferais bien remarquer que la ponctualité est une forme de respect. Mais mon coté « cool » reprend le dessus.

La discussion commence donc avec Mme TRUC, un peu gênée d’être ici, seule, sachant qu’elle n’est pas dans ses droits… Comme Homer et moi sommes des personnes civilisées, bien élevées et polies, nous lui faisons « la conversation ». Dix minutes plus tard (donc 10h15), arrive Mme MACHIN, l'inspectrice, qui n'est en fait que conseillère pédagogique. Son nom est inconnu au bataillon, et ne correspond pas au nom inscrit sur le courrier… Ca continue de m’agacer. Ils ne sont pas foutus de s’en tenir à ce qu’ils disent sur leur courrier.

La CP (conseillère pédagogique, qui prend l’habit de l’Inspectrice, par délégation), après s'être excusée de son retard, annonce la couleur : Il s’agit de mieux se connaitre avec Bart, pour mieux appréhender le prochain RDV, qui a lieu en mars, qui fera l’objet de tests à l’IA.

Il me vient une quatrième idée à l’esprit, que je formule à voix haute cette fois : « Il m’a été précisé par téléphone, que ce 1er rdv était « indispensable » (j’insiste sur le mot pour dénoncer les incohérences) pour créer une confiance entre Bart et l’équipe qui l’évaluerait en mars. Mais vous m’annoncez déjà que vous n’êtes pas l’une des personnes qu’il rencontrera en mars. Ce premier RDV n’a donc plus réellement l'intérêt souhaité !? »

La tête de la CP passe du sourire franc aux lèvres figées. Elle comprend que je suis une « chiante » et qu’il va falloir me brosser dans le sens du poil. Elle le fait. « Mais je serai là également en mars, ne vous en faites pas. » Ouais, on verra ça, on y est pas encore en mars…(ça je le dis dans ma tête)

Je reprends une gorgée de café et je me félicite de ne pas leur en avoir proposé, tiens !

Mme MACHIN sort un netbook (on sent le manque de moyens à l’inspection académique et là c’est pas ironique) et commence à faire l’inventaire de ce qu’elle va demander (situation professionnelle, âge, choix d’instruction, lien social de l’enfant avec l’extérieur).

Et elle ajoute : "Pendant que nous parlerons ensemble (elle nous désigne Homer et moi), Mme TRUC (la psy) va s’entretenir seule avec Bart."

La PS me demande où elle peut s’installer avec Bart. Je lui montre le canapé d’un hochement de tête (que j’accompagne d’un sourire, tout de même), canapé situé derrière elle. Elle semble peu satisfaite, mais elle fait avec (elle constate qu’elle n’a pas le choix). Non pas que mon canapé soit dégueu (bien qu’un peu bousillé dans les coins à cause de Boule de Neige), mais apparemment, c’était trop près de nous. « Excusez-moi Madaaaaame la psychologue scolaiiiire, de ne pas avoir un loooft de 300 m² ! » (ça aussi je le dis dans ma tête)

Pendant que les premières questions sont posées à Bart, à 3 mètres de nous, la CP commence son "blabla" avec nous les parents. J’avoue que pendant un petit moment, je ne l’ai pas du tout écoutée. J’étais concentrée sur ce que Bart répondait aux questions de la PS. (Comme j’étais fière de ses réponses !)

Extrait de conversation entre Bart et la PS :

-          Alors, comment s’appelaient tes copains à l’école ?

(Il balance des prénoms en vrac)

-          Ok, et tu les as revus ces copains depuis que tu fais l’école à la maison ?

-          Oui oui, plusieurs fois, dans les rues de la ville.

-          Ah bon ? Tu les revois pour passer du temps avec eux alors ?

-          Ah non, on les a croisés plusieurs fois avec maman, quand on se promène, qu’on va à la gare, prendre le train pour aller à des expos ou des musées, ou qu’en revient. A chaque fois eux ils étaient tous ensemble, avec la classe. Ils revenaient surement de la piscine ou de j’sais pas où.

-          Ah, et tu leur as parlé un peu ?

-          Oui un peu.

-          Et de quoi vous avez parlé ?

-          De l’école à la maison. Ils voudraient tous faire comme moi. Ils disent que j’ai trop de chance. 

La discussion se poursuit donc en stéréo. D’un coté nous les parents avec MACHIN, de l’autre Bart avec TRUC. Je décide finalement de me concentrer sur ce que dit mon interlocutrice, car j’ai l’impression que cela fait un petit moment que je n’ai pas hoché la tête ou fait un « voui » pour manifester mon attention. J’espère qu’Homer l’a fait pour nous, je n’en suis pas sûre à ce moment là. Je saurais plus tard que non. Lui aussi a écouté Bart et la PS… Les parents, toi !

Je vous épargne les longueurs du discours de Mme MACHIN, qui se résument en quelque sorte, à prendre un peu les gens pour des débiles, leur parler comme s’ils avaient 5 ans, leur expliquer ce qu’est l’instruction, les obligations, les devoirs des parents envers les enfants… Des choses que nous savons mieux que quiconque, puisque nous avons fait le choix d'instruire nos enfants d'une façon différente...
Nous avons tout de même eu la chance, l’honneur que dis-je, de connaître un peu la vie de la CP, qui semble galérer avec l’EN et qui semble aussi réfléchir à sortir son gamin de l’école. Mais, elle n’en est qu’à sa période de réflexion.  Elle nous fera d’ailleurs cette confidence à voix basse (ce qui nous a amusé), pour ne pas que la PS entende (on imagine que c’est pas Bart qu’elle voulait épargner de cet aveu).

Les questions s’enchainent, sous forme d’un dialogue assez riche. Je dois admettre que nous avions face à nous une personne d’une trentaine d’années, très à l’écoute, sainement curieuse (aucune question inappropriée ne nous a été posée), souriante, agréable, courtoise, polie et compétente en apparence (en apparence, j’apporte cette nuance non pas pour mettre du suspense, mais simplement parce que c’est le cas – en apparence, elle est compétente, je ne la connais pas assez pour la juger davantage , malgré toutes les qualités que je viens de lui allouer.)

Je tends toujours une oreille distraite, de temps en temps sur la conversation que Bart fait à la PS. Oui, Bart le bavard s’en donne à cœur joie. Pour une question composée de 5 mots, il développe une réponse en 10 phrases. La PS doit se régaler ! Elle prend des notes, mais je vois bien qu’elle ne peut pas tout écrire, Bart en dit beaucoup.

Extrait de conversation entre Bart et la PS :

-          Comment est évalué ton travail à la maison ? Tu as des notes, tu as des appréciations ?

-          Non, maman me laisse m’autoévaluer (il a vraiment dit ça).

-          Alors comment ça se passe exactement ?

-          Je fais des exercices, sur les divisions par exemple (normal qu’il en parle, ça fait 3 semaines qu’on est dessus, on en a fini !). Je me mets au tableau ou j’écris sur mon cahier d’exercices et je vérifie avec maman. Si je me suis trompé, j’ai pas besoin qu’elle me note, je sais que je me suis trompé en vérifiant le résultat.

-          Et si tu te trompes, comment ça se passe après ?

-          Bah je recommence avec maman. Mais là, ça fait un moment que je ne me trompe plus. On en a tellement fait aussi, maintenant ça me parait facile.

Arrive la question de la CP sur l’année prochaine, CP qui tente, tant bien que mal, de capter notre attention. Elle aussi se fait surprendre à écouter Bart, et sourit de temps en temps. Que comptons-nous faire l’an prochain ?

Pour le moment, rien de défini. Nous ne savons pas encore ce que nous ferons dans quelques mois. Nous n’en sommes pas là. Mais vous serez évidemment tenue informée. Oui parce que l’an prochain, c’est le collège, la 6ème, le monde des minis-grands, un univers inconnu pour Bart, si ce n’est à travers le récit de son frère (que je dois appeler Lisa ou Maggie pour la cohérence de l’histoire, mais il n’appréciera pas du tout^^).

Son frère qui a d’ailleurs subi le harcèlement scolaire. Tiens, parlons-en un peu du harcèlement scolaire. Le documentaire diffusé récemment sur France 2 sur ce sujet si douloureux a réveillé en nous (Homer et moi) des douleurs assez vives. Nous faisons partie de ces parents qui sont restés spectateurs du harcèlement de leur enfant, sans agir comme il aurait fallu. Notre chance est d’avoir un enfant solide moralement.

Le harcèlement de Lisa/Maggie en quelques lignes…


Lisa/Maggie a encore 9 ans 1/2 quand il entre au collège, en 6ème. Il a une année d’avance, il a sauté son CP (il savait lire en grande section), mais même là, lui faire sauter une classe a été un vrai périple et un combat pour son bien-être (ça fera peut-être l’objet d’un article). Et le frère de Bart, c’est un petit gabarit, mais vraiment petit. Il a les cheveux longs, il réussit dans tout ce qu’il entreprend (skate, batterie, dessin, magie…) et il est beau en plus d’être doué et intelligent. Mais il est petit. Les premières semaines qu’il a vécues au collège, se résument à l’horreur pour lui. Et pourtant, ce n’est pas lui qui nous en a parlé. Un jour de compétition de skate, il « pètera un câble », enverra tout promener. C’est là qu’une de ses amies du collège (une grande, puisqu’en 5ème mais avec une passion commune pour le skate) viendra nous voir. « C’est normal qu’il n’aille pas bien, avec ce qu’il subit au collège, je pense que je craquerais comme lui. » A nos yeux ébahis et notre mine blafarde, la gamine a compris qu’on ne savait pas. Elle nous a expliqué ce à quoi elle assistait tous les jours…

« Les premiers jours, tous les élèves du collège faisaient un cercle autour de lui pendant chaque récré; et se moquaient de sa taille, lui disaient de retourner en maternelle, qu’il s’était trompé de chemin… Y’en a qui le portent aussi dans les couloirs, dans les marches, dans la cour. Y’en a aussi qui lui tirent les cheveux. »

Le monde s’écroule sous nos pieds de parents aimants et pourtant si attentionnés et attentifs. Nous n’avions rien compris, rien vu, rien entendu. Quand sa camarade nous a confirmé que maintenant ça se calmait, mais qu’il passait toutes ses récréations à coté d’un surveillant, pour ne pas être embêté, j’ai senti en moi une colère dévastatrice…

Evidement, s’en sont suivies des demandes de rendez-vous, d’explications, de commentaires auprès de la Direction de l’établissement, qui savait ce que subissait mon fils, mais qui à aucun moment n’avait jugé bon de m’avertir. Si vous avez regardé ce documentaire sur France 2 dernièrement, alors vous allez avoir une impression de déjà-vu.

Le principal du collège de dire : « Les choses vont se tasser. C’est le monde des grands maintenant. Le grand frère de Bart va pouvoir affronter tout ça. Et puis, vous savez, il n’y a rien de méchant. On vous aurait prévenu si cela avait été plus loin. » PLUS LOIN GENRE QUOI ?

Donc oui, l’Education nationale se moque de ce que nos gamins subissent, dès l’instant où les résultats scolaires sont là. Les gamins à gérer, ce ne sont pas ceux qui sont harcelés, se sont ceux qui sèchent les cours, qui répondent aux profs, qui fument devant le collège

Fin de la parenthèse concernant le grand frère de Bart.

L’entretien touche à sa fin. Je m’aperçois qu’à aucun moment elles ne  demanderont à consulter les livres et supports sur lesquels travaille Bart, ni ses cahiers, ni ses productions. Pourtant, on m’avait dit que c’était "e-ssen-tiel "pour l’IA de pouvoir observer les outils de travail de Bart.
Admettons que le mail très complet (4 pages pleines), que j'ai rédigé à l'IA, sur notre programme informel, aura suffit à ce qu'on ne nous en demande pas davantage.
Apparemment, Bart a du mal à laisser la PS conclure.

Extrait de conversation entre Bart et la PS :
- Qu'est-ce que tu fais de particulier les weekend?
- Le samedi soir, j'ai le droit de regarder 2 épisodes de séries. Vous connaissez "Person of interest"?
- Non, je ne connais pas.
- Heu, vous connaissez "Elementary"?
- Non plus... (Là Bart se demande d'où sort cette dame pour ne pas connaître ces séries).
- Elementary, c'est Sherlock Holmes revisité en fait... (Trop fort le Bart!)

Pour conclure cette loooongue discussion avec Bart, elle se fera heureusement aidée par la CP, qui lui demandera : "c’est ok pour toi? ". Et c’est là que la PS va donner le bâton pour se faire battre, en précisant qu'elle va conclure...

Extrait de conversation entre Bart et la PS :

-          Alors Bart, tu as des questions sur tout ce que nous avons abordé ensemble ?
-          Oui, au sujet des évaluations le mois prochain. Pourquoi vous ne voulez pas que je les passe à la maison, et on vous ramène les feuilles. Parce que passer des tests dans un endroit que je ne connais pas avec d’autres enfants que je ne connais pas non plus, ça peut quand même être perturbant pour moi. (Il a vraiment dit ça et je ne lui ai jamais soufflé ! J’étais fière une fois de plus !)


Alors voilà comment s’est déroulé cet entretien officiel mais pourtant assez informel. La CP et la PS vont faire leur petit bilan, leur compte-rendu sur ce qu’elles auront pu constater à la maison. Et elles vont (peut-être) nous faire savoir que Bart semble tout à fait à sa place en IEF et qu’il ne semble rencontrer aucune difficulté. Mais la question qui reste en suspend : test ou pas test en mars ?


 
Pendant le débriefing, Bart nous avouera ne pas craindre les tests. Il a même envie de prendre ça comme un défi. Alors s’il persiste dans cet état d’esprit, nous ne le priverons pas de son prochain défi.

Il est important de ne pas influencer ses propres enfants, quelles que soient les circonstances (politiques, religieuses ou autres). Bart a 10 ans, mais il assure grave ! Il a su se dépatouiller comme un chef de toutes ces questions (parfois "simplettes") et je suis certaine que la PS est repartie sous le charme.

Donc au final, l’expérience vécue est positive. J’ai eu beau tenter de jouer les méchantes, les chiantes, les pointilleuses, mais j’ai eu face à moi deux personnes sympas, qui ont su garder leurs distances avec tout jugement de valeur, ce que j’ai apprécié. Pas certain qu’elles soient nombreuses les CP et PS comme elles, mais elles, je les veux bien l’an prochain si on continue.

Merci à Marge pour ce récit et ce témoignage authentiques!

 

jeudi 5 février 2015

Syndicalistes : les chouchous de la Direction


Syndicaliste : les chouchous de la direction !

Comme à mon habitude, je vais prendre la plume de mon second degré pour la plus grande partie de mon article. Ce qui motive cet écrit, c’est la bêtise humaine, dans son sens le plus large. Que vous soyez syndiqué ou non, syndicaliste ou pas, cette lecture devrait vous intéresser. Je ne promets toujours pas de faire court, car personne ne me donne de consigne et je choisis de m’exprimer avec les mots qui sont les miens, pour partager tout mon écœurement (oui, on ne partage pas que de belles choses, c’est moche !)
Je précise que le contenu de cet article n'engage que moi, et je ne parle qu'en mon nom.

Je vais vous parler de Régis, un syndicaliste, un homme que je ne connais pas personnellement, mais que j’ai croisé des dizaines de fois, à qui je dis bonjour, à qui je souris. Même si l’on ne se connait pas personnellement, cela ne m’empêche pas de m’exprimer sur son sujet. Je brandis le drapeau de la liberté d’expression !

Mais c’est quoi un syndicaliste ?

Commençons par le commencement…

Source Wikipédia (ce n’est jamais une source 100% fiable, mais là, ça va !) : Le syndicalisme est le mouvement qui vise à unifier au sein de groupes sociaux, les syndicats, des professionnels pour défendre des intérêts collectifs. Le syndicalisme désigne également l'action militante qui cherche à poursuivre les buts d'un syndicat.

Ok, je ne vous ai rien appris. En France, on compte environ 10% de syndiqués, c'est-à-dire 10% de personnes salariées qui adhèrent à un syndicat, quel qu’il soit. (Ils étaient 30% en 1950…)

Après, pour que tout cela fonctionne, il faut des leaders. C’est le principe même des élections professionnelles, qui invitent les salariés à voter pour leurs représentants syndicaux, ceux-là même qui vont être (ultérieurement) directement confrontés à l’employeur (ou plutôt aux « sous-fifres » du Big Boss, certains de ces cadres, simplement salariés, qui se prennent pour des gens de pouvoir, alors qu’eux-mêmes ne font qu’exécuter les ordres d’autres cadres, eux aussi simples salariés), pour faire part des revendications des salariés.

Les syndicats ne sont pas des chiens (pas tous du moins), et ils n’exigent pas que vous soyez « cartés » (comme on dit dans le milieu pour dire que vous avez pris votre carte à CGT, UNSA, FO, Sud Rail ou autre…), pour prendre en charge vos revendications et vous aidez dans vos démarches.

Les bons samaritains

Oui, si le mot est un peu fort, il définit pourtant bien ce qu’est un représentant syndical. En résumé, le type (ou la nana) se démène pour vous, bénévolement, sur son temps libre et /ou sur son temps libéré pour sa fonction syndicale (mais bien souvent, il lui faudra empiéter sur son temps libre).

Si le DS (délégué syndical) n’attend rien de vous en échange, son combat reste intègre et loyal. Un DS (soutenu par sa délégation évidemment) met tout en œuvre pour que les choses soient faites légalement, sans ambiguïté et pour qu’aucun reproche ne puisse être constaté lors d’une quelconque procédure en cours ou à venir.

Il était une fois, Régis…

Régis, 40 ans. Cheminot depuis 20 ans, militant depuis 20 ans, délégué du personnel (représentant syndical), membre du CHSCT, conseiller prud’homal depuis 10 ans. Aujourd’hui, Régis a le couteau sous la gorge. La corde est à son cou, le nœud est fait, la lame de la guillotine est aiguisée. Ce  n’est pas un suicide qui guette Régis, mais une mise à mort. La mise à mort est organisée par les tout-puissants, les maîtres à penser, les décisionnaires, la Direction, bref l’entreprise pour laquelle il travaille depuis 20 ans. Pourtant, Régis est un agent exemplaire, aucune sanction disciplinaire dans son dossier, inconnu des services de police (ah ah !), un homme sans histoire…

Est-ce que Régis est un con ?

Comment ne pas en arriver là… Vous connaissez tous le fameux « Régis est un con », lancé sur Canal + par les Nuls. On se marrait bien de voir Régis se casser la gueule en essayant de sauter dans une piscine en plastique de 30 cm de profondeur, ou de voir ce même Régis (qui était en fait un autre Régis, et qui en fait, ne s’appelait pas Régis, oui, le mythe est brisé, mais aucun d’entre eux ne s’appelaient en fait réellement Régis) se viander sur ses skis. Bref, Régis est un con, un maladroit, un type qui ne fait que des conneries, qui est toujours filmé quand il en fait une belle et qui subit les ricanements des spectateurs. Seulement dans mon histoire, Régis s'appelle vraiment Régis, Régis n'est pas un con et les gags dont Régis est témoin ne sont pas drôles du tout.

Bref, Régis n’est pas toujours un con, loin s’en faut

Le Régis dont je vous parle, il existe réellement. C’est un type qui bosse pour une grande boite qui tente de faire rouler des trains sur des voies qu’elle loue. Régis, c’est un type qui vit pour son entreprise depuis 20 ans. C’est un gars ordinaire, sans cape de super héros, qui tente, avec son savoir, son bagou, sa bonne volonté, son optimisme et son sens de la camaraderie, de venir en aide à tous les collègues qui font appel à lui.

Il ne fait pas dans la discrimination Régis. Homme ou femme, hétéro ou homo, noir ou blanc, jeune ou vieux, handicapé ou valide, religieux ou agnostique, il s’en fout de ce que vous êtes dans votre for intérieur. Ce qu’il voit, c’est une personne qui appelle à l’aide et il répond présent, comme des centaines d’autres délégués syndicaux, il a pour quête d’accomplir la mission pour laquelle il a été élu et choisi : défendre les intérêts professionnels (et parfois personnels) de ses collègues, lorsqu’ils sont en difficultés dans l’entreprise.

Et ça, les collègues l’ont bien compris ! (formule genre Capital ou Zone interdite, à chier, mais qui passe bien ici)

Oui, les collègues en difficulté dans la même entreprise que Régis, dans le même établissement que lui (parce que l’entreprise dont nous parlons est très grande et se divise entre autre, en établissements) ont bien compris que Régis n’était pas un con.
Régis, c’est même un modèle dans sa catégorie : respect et connaissance des règlements (et il y en a toute une chiée !), franchissement des étapes en toute légalité et avec plein de bon sens (on commence par le dialogue, on tente de démêler des situations tendues en s’autorisant des médiations avant d’intervenir davantage). Il en a sauvé des têtes dans la boite. Des têtes de cons parfois, parce qu’on ne choisit pas la tronche de son « client » (même si parler de client est inappropriée, car rappelons que pour ses fonctions de délégué, Régis, comme tout autre DS, ne touche pas de prime). Alors oui, il a du traiter des affaires tordues, mais il a toujours pris soin de déceler le bon coté des gens (parce qu’il est naïf quand même Régis à défaut d’être con, même s'il sait aujourd’hui qu’il s’est fait manipulé par certains), il a toujours voulu croire que derrière une facette un peu sombre, derrière des reproches professionnels faits par l’entreprise au gars qu’il défend, il y avait nécessairement un petit minois qui méritait d’être soutenu…

Alors il a enchainé les « affaires » (comme on dit encore dans le milieu), il a combattu (sans armes et souvent par les mots) pour régler des histoires parfois hallucinantes (classées secret-défense), pour sauver la peau de ses collègues. On a tous droit à notre seconde chance (parfois troisième, quatrième et cinquième pour certains). Mais c’est ça son talent à Régis. Convaincre la boite que l’agent Z, qui a fait appel à lui pour être défendu, mérite toutes ces chances supplémentaires. Il en a du savoir-faire Régis ! Il sait utiliser les bons mots, les bons arguments, les bons référentiels (les textes de loi internes à l’entreprise si vous préférez), les bons alinéas, les bonnes jurisprudences… Bref, Régis c’est pas le con de Canal +, non Régis c’est le « sauveur » pour de nombreux cas, que bien d’autres auraient laissé au placard, tant ils étaient difficiles à défendre.

Mais Régis, ce n’est pas l’avocat du diable, ça non ! C’est surtout, un type qui sait que dans la vie professionnelle, nous sommes tous confrontés, un jour ou l’autre, à une connerie, une bêtise, une erreur, un écart, un excès, volontaire ou involontaire, et il ne peut pas laisser le Big Boss nous mettre au tapis (nous les fautifs) sans nous donner les moyens de nous rattraper. Mais il faut bien admettre qu’aujourd’hui, Régis est contraint de faire un bilan plutôt négatif de ces cas qu’il a défendus : y’avait pas mal de cons parmi eux, et ils ne s’appelaient toujours pas Régis, eux non plus…

Les cons ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnait !

Audiard avait bien raison, les cons ça ose tout. Pour preuve, certains agents que Régis a défendus (là on parle des cons), se liguent aujourd’hui contre lui. Mais attention, sous couvert d’anonymat! N’oublions pas que nous avons face à nous des vrais langues de vipère, des témoins avec des perruques, des anonymes masqués, à la voix transformée. Mais par contre, ces types sont de vrais moulins à connerie. Et ils osent tout ! Ils inventent, ils déforment, ils manipulent la réalité, après avoir été eux-mêmes manipulés par leurs gourous.

On n’est pas des salauds, seulement des cadres et des fonctionnaires supérieurs!

C’est l’argument que la boite met en avant, quand elle décide que Régis en a trop fait.

" Oui bon, Régis, écoute, ça va bien là ! Maintenant, tu vas arrêter de nous faire des procès, parce qu’on est quand même ton employeur tu vois ? Jusque là on t’aimait bien, mais les condamnations en justice que t'as obtenues, ça commence à faire trop. Ca fait même tâche, et là, le patron, il a dit STOP ! Donc c’est pas contre toi hein, mais Régis, là on va devoir monter un petit dossier, et on va essayer de te faire dégager de la baraque, parce que t’es en train de nous les briser menues ! Donc je t’explique comment ça va se passer, on a fait une petite liste avec les copains de la Direction pour ne rien oublier, et on a monté une petite histoire qui devrait faire pleurer dans les chaumières du patron et si possible du Tribunal. Ah oui, parce qu’on aimerait bien que tu prennes un peu la place sur le banc des accusés. Chacun son tour vieux, tu nous y as mis combien de fois toi ? Sous prétexte qu’on ne respectait pas le règlement ? Comme si ça suffisait ! Tu sais bien que les patrons ont le pouvoir ! Non, tu savais pas ptêt, bah là, tu vas comprendre… Donc dans notre petite histoire, nous en veux pas, mais on a du inventer pas mal de choses qui ne tiennent pas la route pour que tu n’en réchappes pas (tu sais bien que quand on veut tuer son chien il suffit de dire qu’il a la rage), oui là on veut vraiment que tu dégages et on risque même de te botter le cul pour ça… Alors on disait, l’histoire qu’on va raconter, c’est ça, en quelques points (on te la fait courte, mais on voudrait pas que tu crois que tout ça est directement contre toi, rien de personnel tu vois…)

-          Faire une liste de faux témoignages, mais avec des  vrais gens, des gens que tu as défendu de préférence, oui parce que parmi eux, on a trouvé de beaux salauds, faciles à appâter, tu vas pas en revenir de ce qu’ils sont prêts à dire sur toi (de mal évidemment). Par contre, comme ces gens vont mentir,  ils préfèrent rester anonymes, tu comprends hein ?

-          Faire la liste de tous les procès que tu nous as mis aux fesses, avec tes idées de défendre l’agent lambda. Nous mettre face à nos manquements au règlement, ça finit par nous vexer... Heureusement que tout ceci va être mis sous clés ! Nos potes du MEDEF nous ont donné quelques idées précises pour déglinguer les syndicats. Ils s’imaginent sans doute qu’on leur rendra la pareille! Oh, j’te jure Régis, on est vraiment dans un monde où les gens qui croient avoir du pouvoir sont prêts à tout pour sauver leur peau !

-          Surfer sur la vague bien haute des « mauvais » responsables de la CGT, tu sais avec leurs histoires d’appartement refait à neuf, leur télé géante, et tout le bazar, là, ça colle parfaitement avec notre idée de démonter la CGT. Pour commencer hein! On verra après pour les autres, parce qu’ils sont nombreux ces syndicalistes crédules à s'imaginer qu’ils vont faire de la boite une boite meilleure pour les cols bleus !

-          Faire la liste des gars qui t’ont connu à tes débuts, tu sais ceux qui sont à la retraite maintenant, et qui pensent qu’ils nous doivent tout, parce qu’on a su les couvrir en temps voulu. On a rien dit de leurs extras, si tu vois ce que je veux dire. Eux, c’est dans la poche,. Tu vas être surpris, les gars ont pris un sacré coup de vieux depuis qu’ils sont partis.

-          Faire une liste de nos « amis » et « connaissances » au Tribunal d’Instance et de Grande Instance. Oui, parce que tu nous as bien niqué sur les deux. Ok, t’as gagné tes procès réglo, mais tu crois quand même pas que ça va suffire ? Bah non Régis…

-          Essayer de te faire bouffer tout ce que tu nous as fait bouffer : tu te souviens des procès pour harcèlement, discrimination et tout le bordel ? Oui tu t’en souviens, tu les as gagnés ! Bah on a dans l’idée de te faire des procès pour la même chose. Tu noteras notre « fairplay » dans l’histoire. On ne te rend que la monnaie de ta pièce, ni plus ni moins.

Bon on avait dit qu'on ferait court mon Régis, mais on a du mal, tu sais les types comme nous, qui sont payés pour faire croire aux autres que ce qu’ils ont est assez bien pour eux, on a souvent du mal à faire court. On est toujours dans l’argumentation exagérée, dans le surplus d’info et dans le mélange des données, comme ça, on vous embrouille, on sème le doute et on finit par gagner. Tu verras ! On finit toujours pas gagner..."

Cette discussion imaginaire entre Régis et ses détracteurs vous fait sourire? Je pense pourtant que la réalité est proche.

Une sanction qui fout la trouille

Donc, notre Régis a bien entendu essayer de se défendre, soutenu par de nombreux collègues, des organisations syndicales, des syndiqués et des non syndiqués. Mais les arguments de sa défense ont été mis sous silence. Ils ont fait la sourde oreille les Big Boss, chose qu’ils maitrisent parfaitement là haut, quand il s’agit de ne pas ouvrir les yeux sur les aberrations, les mensonges et les rumeurs (sourde oreille, ouvrir les yeux, j’humanise le pouvoir). Oui, évidemment, les témoignages venant controverser les "fausses rumeurs" qui courent librement sur Régis, n'ont pas été entendus. Ils ont été présentés, certes, mais personne n'a jugé utile de les voir, de les lire, de les considérer. Cela aurait pourtant suffi à mettre un terme à toutes ces calomnies. Seulement, l'ambiance n'est pas à la discussion, ni au débat. L'ambiance est à l'anéantissement , au torpillage et à la disgrâce d'un homme, parce qu'il est syndiqué, syndicaliste, parce qu'il a mis à mal son employeur à plusieurs reprises, parce qu'il n'a pas laissé faire tout et n'importe quoi, parce qu'il a agi avec conviction et ferveur, pour défendre des agents en souffrance sur leur lieu de travail, parce qu'il n'a pas voulu taire la discrimination, ni le harcèlement. Un homme dont on veut la tête, parce qu'il est finalement compétent. Ils sont rares les compétents, et ils dérangent les autres, les incompétents. Ils empêchent les cons de tourner en rond, ou de traverser les couloirs avec des dossiers vides sous le bras. Les gens compétents se donnent souvent du mal pour que le monde professionnel évolue dans le bon sens, pour que le respect du salarié soit une obligation, un devoir et plus seulement une forme de savoir-vivre...
Mon pauvre Régis, je suis sûre que si c'était à refaire, tu ferais pareil. Tu aiderais ces mêmes agents qui aujourd'hui crachent à ton visage sans que tu ne puisses voir le leur. Tu passerais des heures entières sur tes jours de repos pour dénouer les affaires les plus sensibles, celles qui t'ont mené au TI ou TGI et celles pour lesquelles tu paies de ta personne aujourd'hui. Tu ne changerais rien, tu mettrais toujours autant de cœur et de conviction pour faire face à une Direction pas toujours tendre, mais qui a su reconnaître ton talent dans ton art syndical, cette même Direction qui aujourd'hui, serre petit à petit le nœud de la corde qu'elle a mis elle-même autour de ton cou. Tu ferais la même chose, car quand on est un homme investi, on le reste.

Mais après tout, le conseil de discipline c’est pas la mer à boire. Hein... ? Si... ? On me dit que Régis risque sa place, on me dit que Régis risque 10 jours de mise à pied ferme (c'est-à-dire 10 jours sans se rendre sur son poste de travail et 10 jours sans être payé). On me dit que c’est le dernier avertissement (et pourtant c'est le premier). Ah bah merde, cela veut-il dire que si un autre incompétent décide de monter un petit dossier contre lui, Régis prendra la porte ? Bah oui, ça veut dire ça. Pourtant, comme je vous le disais un peu plus haut, Régis est irréprochable jusqu’ici. Mais lui, le syndiqué syndicaliste, contrairement aux autres salariés, il n’a droit qu’à une chance. Si l’on peut appeler ça de la « chance »…

Agissons ensemble et luttons contre ces manipulations politiques

Comment laisser une telle mascarade se jouer sous nos yeux? Nous ne le pouvons pas, nous ne le devons pas. Nous devons tous montrer (syndiqué ou non, syndicaliste ou pas, cheminot, enseignant, notaire, médecin, infirmière…) que nous ne sommes pas d’accord pour laisser mettre à mal tout ce que nos aïeux ont cherché à protéger jusqu’ici (quand ils étaient 30% de syndiqués en 1950) : la défense des salariés au cœur même de leur entreprise , autrement dit, le syndicalisme.

Partout où le syndicalisme n’existe pas, le patronat se délecte. Il peut harceler, manipuler et contraindre ses employés, sans tenir compte des réglementations en vigueur. Le MEDEF sait que les syndicats sont des grains de sable de plus en plus gênants dans les rouages de la machine manipulatoire orchestrée contre les salariés.

En l'absence de syndicat dans une entreprise, qui défend les intérêts du salarié ? Personne. Il se défend lui-même, ou il ne se défend pas. Il accepte que son salaire n’augmente pas pendant 10 ans ; il accepte que son temps de travail supplémentaire ne soit pas rémunéré à la valeur normale d’une « heure supplémentaire » ; il accepte que ses congés lui soient refusés pendant la période qu'il demande; il accepte que son salaire lui soit versé le 10 au lieu du 2 comme d’habitude ; il accepte de venir travailler avec 40° de fièvre pour arranger son patron…

Dire qu’il accepte, c’est une forme de respect pour lui, ce salarié sans organisation syndicale dans son entreprise, sans bouée de sauvetage, sans gilet pare-balle. Parce que dans le fond, nous savons tous qu’il n’accepte pas, mais plutôt qu’il n’a pas le choix, si ce n’est celui de se rebeller, aux risques de devoir prendre la porte (sans indemnité, licenciement pour fautes graves, et on n’en parle plus !)

Ne laissons pas Régis se faire pousser à la porte de sortie de l'entreprise. Il ne demande pas de médaille, il ne demande pas de reconnaissance de ses pairs. Non, il veut simplement pouvoir continuer l’exercice de son métier, mais aussi perpétuer son engagement syndical auprès des salariés, sans crainte de représailles injustifiées. Alors pas question d’accepter une sanction, quelle qu’elle soit.

Pour manifester leur désaccord avec la sanction encourue par Régis, de nombreux salariés se sont déjà rendus sur les lieux de « l’exécution », les 22 et 29 janvier derniers. Ces mêmes salariés et d’autres encore, sont invités à se rendre à nouveau sur les lieux de la mise à mort, le 11 février 2015.
 
Merci à Arnaud pour son aide, sa relecture, ses idées et ses formules qui sont parfois (je dis bien parfois), meilleures que les miennes !